Nicolas Gervais, soldat de 1727 à 1738
I. Enfance
Nicolas Marin Gervais nait à Val-Petit en Brie (ou Vert-le-Petit dans l’actuel département de l’Essonne), le 9 avril 1707.
Son père, Marin Gervais, était jardinier de Monsieur Bosc seigneur de Vert-le-Petit, au château du Bouchet au sud de la paroisse. La terre et baronnie du Bouchet Valgrand appartenait à ce maitre des requêtes dès la fin du XVIIe siècle et relevait du comté de Montlhéry appartenant au duc d’Orléans. Quant à sa mère, elle s’appelait Françoise Paquier. Ils lui choisirent pour parrain Nicolas Maupin le receveur de Monsieur Bosc et pour marraine Louise Perichon femme de Marin Houdoyé laboureur.
Trois ans après sa naissance une petite Thérèse vient agrandir la famille. Elle a des parrain et marraine d’importance. Son parrain est Me Isaac Joseph Balade conseiller du roi trésorier receveur général et payeur des rentes à l’hôtel de Ville et sa marraine n’est autre que Dame Grace Angelinne Dognette du Bouchet épouse de Mr Bosc le seigneur du Bouchet, employeur de ses parents.
Je ne connais malheureusement rien de leur vie après cette année 1710.
II. Engagement
Avant de détailler mes trouvailles, expliquons comment fonctionnent les registres de l’ancien contrôle des troupes. L’année de leur rédaction, tous les hommes présents dans le corps sont très bien détaillés. On y apprend leurs
- prénoms,
- nom,
- nom de guerre donné lors de l’enrôlement semble-t-il,
- filiation,
- lieu de naissance,
- âge,
- signalement,
- date d’enrôlement ou engagement,
- date de transfert, mort, congé ou désertion.
Dans les années qui suivent, ce contrôle des troupes est complété succinctement pour toutes les nouvelles recrues. Si l’on veut trouver à nouveau des détails précis il faut consulter le contrôle des troupes commencé postérieurement.
Ainsi dans GR 1 Yc 84, registre du contrôle des troupes du régiment d’Auxerrois qui date de 1728 et s’arrête en 1737, je peux trouver Nicolas Gervais mon ancêtre que je sais être en 1733 dans la Compagnie de Dumas du régiment d’Auxerrois. S’il est engagé avant 1728 j’aurai tous ses détails, sinon une simple indication…
Il s’est engagé à Paris le 3 janvier 1727, c’est donc très détaillé. Quelle chance !
Il n’a pas encore 20 ans. Sa description physique nous apprend qu’il a des cheveux et sourcils bruns assez fournis, le visage plein et qu’il mesure 5 pieds 3 pouces 4 lignes soit 1,71 mètre ce qui est une taille assez importante pour l’époque.
Une erreur s’est glissée dans ce registre des troupes, ce qui est assez fréquent : sa mère ne se nomme pas Jeanne Embroisse mais Françoise Paquier.
Il y a deux points à préciser :
- l’âge de 22 ans est celui en cette année 1728 mais en réalité il a 21 ans ;
- il est natif de Vallegrand à 4 lieues de Longjumeau, élection de Paris mais ce n’est pas Vert-le-Grand aussi appelé Valgrand mais Vert-le-Petit aussi appelé Val-Petit, juste à côté, dont le château du Bouchet s’appela un temps le château Valgrand, nom de la seigneurie !
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Comme je l’ai indiqué plus haut, je devrais donc le trouver dans le contrôle des troupes commencé en 1721 et arrêté en 1728, le GR 1 Yc 82. Ce ne devrait être qu’un signalement succinct… et c’est le cas ! Là, il a bien 20 ans. Sa description, sa taille et son origine sont peu détaillés.
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Si l’on observe bien la dernière colonne du GR 1 Yc 84, on voit qu’il a été transféré dans la compagnie des Grenadiers en novembre 1735. On devrait donc le retrouver dans ce même GR 1 Yc 84 qui a arrêté d’être complété en 1737. Effectivement, il y est mais alors il n’y a que son nom, son surnom, sa compagnie d’origine renommée Salerie et la date de son arrivée, décembre 1735 (comme les hommes au-dessus de lui dans le registre).
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N’aillant pas encore vu de mention dans la dernière colonne indiquant son décès, son départ ou son transfert, je devrais le retrouver dans le registre suivant du contrôle des troupes rédigé en 1737 et complété jusqu’en 1748, le GR 1 Yc 84. C’est bien le cas, mais surprise, il n’est plus chez les Grenadiers mais dans la compagnie de La Colonelle. Comme c’est à un registre qui vient d’être commencé, il qu’il est entré avant cette année 1737, nous y gagnons à nouveau tous les détails le concernant.
Cerise sur le gâteau, l’erreur commise lors de son engagement en 1727 est corrigée ! Sa mère se nomme très justement Françoise Paquet qui est à quelque chose près le patronyme Paquier.
Il a légèrement grandi depuis ses 19 ans, il ne mesure plus 1,71 mètre mais 1,73 mètre (5 pieds 3 pouces 10 lignes). Et sa description physique apporte d’autres précisions ses cheveux et sourcils sont châtains noirs, ses yeux sont noirs et il est marqué de petite vérole.
Quelle n’est pas ma surprise de découvrir la mention qu’il s’est engagé en 1727 non pas pour 6 ans comme la plupart des hommes mais pour sa vie ! Voilà qui est étrange… La dernière colonne est importante car elle mentionne qu’il a été congédié le 21 mai ou mars 1738. Est-ce vraiment le cas ? Étant donné, que la formule est congédié et non congé absolu, il peut être rappelé mais ce n’est pas vraiment à vie…
Il existe deux explications possibles qui correspondent a deux pratiques qui existaient alors :
- il a racheté son engagement pour se libérer ;
- il n’a pas vraiment quitté l’armée, il est congédié mais c’est pour aller dans un autre régiment.
Je n’ai aucune idée de ce qu’il est devenu après cette date. Je sais juste qu’il est indiqué décédé au mariage de son fils en 1766 mais était-ce vraiment le cas ? Y avait-il des relations entre eux ? Rien n’est moins sûr. Son fils dont je descends est un enfant qu’il a eu de ses pérégrinations militaires…
III. Sa carrière militaire
Je suis maintenant à même de reconstruire sa carrière militaire entre 1727 et 1738.
De tambour pendant 8 années, il est devenu grenadier pendant une année. C’est sans doute sa haute taille qui lui a valu ce changement de compagnie car les grenadiers doivent être grands et forts pour pouvoir lancer assez loin les grenades, sans risque d’être blessés par l’explosion de leurs projectiles, ni même leurs camarades. Ils doivent également être disciplinés pour rester, sans fuir, sous le feu de l’ennemi jusqu’au moment opportun d’allumer les mèches, encore attendre que la mèche soit assez entamée avant de lancer la grenade afin que l’ennemi n’ait pas le temps de la relancer. Leur tricorne évolue au XVIIIe siècle vers un chapeau triangulaire retombant puis un chapeau assez le haut pour éviter de les gêner dans leur lancé. Ils ont toujours été considérés comme des soldats d’élite. La France n’étant plus en guerre dès 1735, il n’y a plus besoin d’autant de grenadiers, Nicolas Gervais redevient simple soldat mais s’il reste dans le régiment d’Auxerrois, il est à présent dans la Compagnie de La Colonelle. C’est la première compagnie du régiment, celle de son colonel alors le Marquis de Conflans.
À quels conflits a-t-il participé avec son régiment ? Aucun !
Précision : les uniformes présentés ne sont pas toujours parfaitement ceux du Régiment d’Auxerrois (détails des poches,…) mais ils en portent les couleurs.
C’est vraiment intéressant ! J’ai encore un ancêtre, Bernard Valentin, à retrouver dans ces archives du contrôle des troupes… sauf que je n’ai aucune idée du régiment…