Voilà une lettre un peu sanglante…
Jacques de Lévis, comte de Caylus ou Quélus selon la prononciation du nord de la France, né en 1554, fut l’un des mignons du roi Henri III.
Le 29 mai 1578, il succombe à ses blessures reçues un mois plus tôt lors du Duel des Mignons.
Jacques de Lévis, comte de Caylus ou Quélus est un membre de la fameuse maison de Lévis. Il est le fils d’Antoine de Lévis, sénéchal puis gouverneur du Rouergue, partie de l’apanage du duc d’Anjou. Porteur d’une missive de son père en automne 1572 à propos des places tenues par les protestants en Rouergue, il fait à 18 ans la connaissance du duc Henri d’Anjou, futur Henri III. Il devient l’un de ses mignons.
Ces faits de vie :
- 1573 : siège de La Rochelle, sous la direction du duc d’Anjou,
- 1574 : membre de la suite de ce prince lors de son bref règne en Pologne,
- 1575 : échanson de la maison du roi Henri III,
- 10 octobre 1575 : bataille de Dormans,
- juillet 1577 : fait prisonnier à Saugeon, près de Brouage, par les huguenots dans une action organisée par le gouverneur protestant de Royan. Il est relâché trois mois plus tard après la signature de la paix et le paiement d’une rançon.
Mais qu'est-ce qu'un mignon ? C'est le nom ou la qualité donné, à partir du XVe siècle, en signe d'amitié profonde, à un serviteur de confiance du prince. Il est autorisé à s'habiller comme lui ce qui est un grand honneur alors que le code vestimentaire obéit à des règles strictes pour désigner le rang social. Le mignon a également le privilège de dormir dans la même chambre et souvent dans le même lit que le souverain sans aucune connotation sexuelle. C'est l’ultime consécration d’un courtisan, très pratiquée par Henri II. Durant le règne de son fils Henri III, cette pratique est source de grande jalousie. Les mœurs évoluent, le raffinement et l'apparence sont mis à l'honneur : on se farde, se poudre, se frise les cheveux et on porte des boucles d’oreille, de la dentelle et de grandes fraises empesées. La cour du roi Henri III voit donc apparaître un cercle restreint de favoris qui connaissent, grâce à leur protecteur, une fortune fulgurante. Les mignons font alors l’objet de railleries et le terme prend une connotation péjorative. Dans le cadre des guerres de Religion, les Huguenots, hostiles à toute frivolité, leur prêtent des mœurs frivoles et « efféminées », voire des pratiques homosexuelles. Puis ce sont les ligueurs qui mènent à partir de 1585, une vaste campagne de désinformation contre Henri III et sa cour.
Jacques de Quélus meurt le 29 mai 1578 suite au terrible duel des Mignons. Que s’est-il passé ? Comme tout un chacun sait, la pratique des duels était alors commune pour régler un différend. Une querelle aurait opposé Quélus, grand favori du roi Henri III, à Charles de Balzac, baron d’Entragues dit Entraguet, alors quelque peu en défaveur à la cour. Il aurait aperçu ce dernier sortant de la chambre d’une dame aux mœurs légères et se serait moqué de lui. Les deux hommes auraient alors convenu d’un duel en présence de témoins le lendemain à l’aube.
Le 27 avril 1578, vers cinq heures du matin, les protagonistes se retrouvent au marché aux chevaux près de la Bastille. Entraguet est accompagné de ses deux témoins, François d’Aydie de Ribérac et Georges de Schomberg ; le comte de Quélus est accompagné de Louis de Maugiron et Guy d’Arces de Livarot.
Aucune conciliation n’étant acceptée, le duel commence tant entre les deux hommes que leurs témoins. Âgés de 18 à 30, aucun ne porte d’armure. Le duel est bref et d’une grande violence. Malheureusement, Quélus a oublié sa dague et ne peut parer les coups de son adversaire qu’avec son bras. Il est touché dix-neuf fois à divers endroits du corps et abandonne le combat tandis qu’Entraguet n’a reçu qu’une estafilade au bras.
Le bilan est très lourd.
Maugiron a reçu de Ribérac un coup d’estoc à la poitrine qui le tue sur le coup. | Ribérac, emporté par son élan, s’est empalé sur l’épée de son adversaire, il succombe le lendemain. | Livarot a reçu de Schomberg un violent coup de taille à la tête, il est hospitalisé 6 semaines et reste estropié. | Schomberg est touché mortellement au cœur par Livarot qui réplique malgré sa blessure. | Quélus agonise pendant trente-trois jours à l’hôtel de Boisy. | Entraguet, par précaution, s’éloigne de la Cour, avant d’obtenir finalement le pardon royal. |
Le roi Henri III fait inhumer en grande pompe ses favoris à l’église Saint-Paul, dans des mausolées érigés pour l’occasion et fait réaliser cette épitaphe pour Quélus, qu’il est souvent allé voir pendant son agonie : Non injuriam, sed mortem, patienter tulit.
Parenté avec les protagonistes : Si Quélus et Entraguet sont parents du 4 au 5e degré par la famille d’Amboise, leur parenté avec moi est plus lointaine. La voici :
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