Une formalité criminelle est donc entreprise devant le juge de Chaumont à la requête de François Montanier et le 25 septembre 1701, les 3 témoins de François Montanier sont convoqués à témoigner, ce qu’ils font.

  1. Le premier est le frère de la victime, Hector Montanier, âgé de 49 ans. Il explique que dès qu’il a été informé le 23 août 1701 par François Barrilliat que son frère était alité chez leur mère, il s’y est rendu. Il a trouvé son frère ensanglanté au niveau de la tête et du visage. Il a immédiatement interrogé sa mère sur les causes de son état et elle lui a expliqué que c’était du fait de son mari à cause de la poursuite faite suite à l’arrêt rendu contre lui. Elle ajoute que ça ne devrait pas être puisqu’ils ont proposé de régler les choses à l’amiable. Elle lui demande de ne pas la mêler à la poursuite judiciaire qui pourrait être faite.
  2. Honorable Anthoine Revilliard, âgé de 26 ans, fils de Me Claude Pierre huissier au Sénat, est le second témoin. Il est chirurgien de Chaumont. Il dit qu’il a été appelé le 22 août 1701 vers 2 heures de la nuit pour aller panser François Montanier alité chez sa mère. Il y est arrivé quelques heures après et l’a trouvé couché dans un lit, la tête ensanglantée à cause d’une plaie sur les pierreux et de meurtrissures sur le visage. La mère de la victime lui explique que son fils est venu réclamer le paiement des dépens auquel son mari Jacques Eudé a été condamné, elle lui a répondu qu’elle n’avait pas d’argent pour cela et son mari les entendant est descendu maltraiter son fils. Pendant qu’il pansait le blessé il l’a entendu dire à sa mère qu’il allait les poursuivre et cette dernière lui a demander de ne pas l’y mêler. Il a aussi appris par Jacqueline Bojat que Jacques Eudé s’est sauvé à cheval emmenant tout le bétail possible sans qu’elle sache dans quelle direction.
  3. Le troisième témoin est Me Aquelin Moussière, âgé de 41 ans et sergent de Fringy. Il dit que François Montanier l’a requis d’aller faire commandement à Jacques Eudé de payer certains dépens s’élevant à la somme de 37 florins 8 sols en vertu de lettres émanant du Sénat l’y condamnant. Il s’est donc rendu à sa demeure accompagné de Claude Berthet de Choisy comme témoin. Il ne se souvient pas du jour exact, seulement que c’était en août dernier. Jacques Eudé lui a alors dit « Mordieu ! Voilà des grands bougres que ces Montanier en me poursuivant comme ils font au lieu de voir les choses à l’amiable. Mordieu, ils me veulent contraindre à quitter le pays mais je serai contraint de m’en défaire !« . Le 17 août suivant, alors qu’il fauche un pré pour Charles Sonier au-dessus du village de Chessenaz, Jacques Eudé est venu le trouver, lui a demandé s’il n’avait pas de tabac -délicate façon de l’aborder… Avant de lui demander s’il n’a pas de copie de la requête des frères Montanier à lui donner et comme il lui répond par la négative, Jacques Eudé ajoute que si ça advenait, qu’il vienne le voir. Et si ce sont les frères qui viennent pour être payer de leurs dépens, il « les leur payerait par dessus les épaules !« .
    Voilà plusieurs menaces plus qu’à demi-mots, n’est-ce pas lecteur ?

Ajoutons à ses 3 témoignages, le rapport du chirurgien Anthoine Revilliard du 22 août 1701, il y précise qu’il a trouvé François Montanier grièvement blessé et ensanglanté dans un lit de sa mère. Ce jour-là celle-ci lui dit que c’est du fait de son mari Jacques Eudé à l’occasion d’un différend. Cela ne semble pas une petite affaire car il lui trouve :

  • une plaie de la longueur d’un travers de doigt pénétrant jusqu’à l’os pierreux (partie très dure de l’os temporal) avec hémorragie
  • une autre contusion sur l’os pierreux du côté gauche de la grosseur d’un œuf
  • une autre contusion qu’il lui trouve derrière la tête aussi de la grosseur d’un œuf
  • une meurtrissure sur l’œil gauche de la hauteur de deux doigts avec une ecchymose tout autour de l’œil
  • trois excoriations (écorchures extrêmement superficielles de la peau, l’épiderme)
    • l’une à gauche du nez
    • l’une du côté droit des narines
    • l’autre du côté gauche des narines
  • le nez est extrêmement enflé
  • deux autres meurtrissures accompagnées d’ecchymoses
    • l’une sur la lèvre inférieure
    • l’autre sur la lèvre supérieure près des deux incisives
  • diverses autres meurtrissures à l’estomac, sur les épaules et dans les lombes.
Création personnelle à l’aide de l’IA

Comme les plaies sont sujettes à inflammation et fluxion, elle peuvent causer de la fièvre. Le chirurgien ne veut pas s’avancer sur la vie ou la mort avant 40 jours écoulés. Il prescrit comme traitement la saignée et le régime de vivre (bouillon etc ?).

En outre le chirurgien donne son opinion sur les causes des blessures. Pour lui, elles ont été causées par :

  • des pierres
  • des coups de bâtons
  • des coups de poings
  • des coups de pieds
  • et autres armes semblables.

Le 15 septembre 1701, le chirurgien de Chaumont rédige aussi une attestation des soins qu’il a apporté à François Montanier depuis le 22 août 1701 jusqu’au 8 septembre 1701 tout d’abord à Chessenaz où il était alité puis chez son frère Hector Montanier où il a eu bien de la peine à se rendre. Il a « pansé et médicamenté ses plaies tous les jours ». À présent il est rentré chez lui à Annecy pour achever sa guérison.

Cette formalité criminelle doit être transmise au Sénat de Savoie car François Montanier s’est aperçu que tandis qu’il portait plainte devant le juge de Chaumont, Jacques Eudé faisait de même au Sénat ! Il s’est rendu à Chambéry à cet effet dès le 8 octobre.

Que va-t-il dire ?

À suivre …

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