Vous vous doutez bien que l’affaire ne va pas s’arrêter là !

Un compromis du 29 juillet 1698 , montre que quelques mois plus tard il y a toujours conflit entre les parties :

  • Jacqueline Bojat et son second époux Jacques Eudé ,
  • Hector et François Montanier les fils de la première union.

Les deux parties ont entre elles des procès civils et criminels pendants devant le Sénat de Savoie comme nous l’avons vu.

Elles décident ici d’un commun accord d’aller à Annecy, d’y prendre chacune un avocat, et de soumettre leur différend à l’arbitrage de Monseigneur l’évêque et prince de Genève (c’est-à-dire l’évêque d’Annecy, prince temporel du lieu) dans un délai de 4 mois. Elles jurent sur leur foi de se conformer entièrement à sa décision, sous peine de 100 écus de 6 florins pièces d’amende pour celui qui ne respecterait pas l’arbitrage. Enfin, elles reconnaissent que le jugement de l’évêque aura la même force qu’un arrêt définitif du Sénat.

Cet acte est un compromis entre les deux parties qui signent un accord solennel devant notaire :

  • elles reconnaissent avoir un différend déjà en procès,
  • elles choisissent un arbitre , ici l’évêque et prince de Genève, impartial et puissant, capable de rétablir la paix entre elles sans passer par une longue procédure au Sénat,
  • elles jurent sur leur foi de s’en remettre entièrement à sa décision,
  • elles fixent un délai pour rendre l’arbitrage, ici avant la Saint-André,
  • elles ajoutent une clause pénale « à peine de 100 écus » pour obliger les deux parties à exécuter la décision.

L’acte est signé en présence de personnages importants qui montrent la valeur du contrat : noble et puissant seigneur Henry de Vidonne de Chaumont baron du Saint Empire, Révérend messire Jean François Gay official de l’évêché de Genève et Me Anthelme Diaconis greffier de l’évêché de Genève.

Ils ont donc 4 mois pour finir leur différend avec l’aide de l’évêque. Comment cela se passe-t-il ?

L’évêque de Genève a à la fois l’autorité spirituelle et la juridiction temporelle sur le territoire d’Annecy et de ses environs. Il était donc un seigneur souverain localement, doté d’un tribunal épiscopal, et jouissait d’une grande autorité morale et politique. Faire appel à son arbitrage permet de terminer le conflit familial qui s’éternise depuis plusieurs années mêlant affaires civiles et criminelles. Les procès pendant au Sénat de Savoie ont un coup non négligeable qu’ils ne doivent plus être en mesure d’assumer…

L’évêque va procéder comme un juge, mais en plus souple. Il va recevoir leurs avocats, entendre les témoins ou lire les dépositions déjà faites devant le Sénat. Il va davantage chercher à concilier avec un accord amiable plus qu’à juger. Mais si les parties refusent, il rend alors un jugement arbitral. À l’issue de la procédure, il rédige une sentence qui non seulement expose les motifs mais surtout tranche définitivement le différend et fixe, le cas échéant, des dédommagements, restitutions ou réparations. Cette sentence doit ensuite être homologuée au greffe du Sénat de Savoie pour lui donner force exécutoire, c’est-à-dire pour qu’elle puisse être mise en œuvre par les autorités.

Ainsi la sentence arbitrale est rendue obligatoire pour les deux parties et un recours à la force publique peut avoir lieu si nécessaire (saisie, contrainte, etc.) en plus de faire perdre immédiatement la caution prévue à la partie récalcitrante.

Cela va-t-il suffire ?

À suivre …

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