Le mariage est un contrat entre un homme et une femme qui s’engage à vivre toute leur vie ensemble.

  1. Le mariage, un sacrement
  2. Avant le mariage: les fiançailles …
  3. Le jour des noces
  4. Les secondes noces et les familles recomposées
  5. Le divorce
  6. Le concubinage et les bâtards

Bibliographie:


1. Le mariage, un sacrement

La réforme grégorienne est un tournant dans l’histoire du mariage. Jusque là, c’était un mariage de type germanique qui se distinguait mal du concubinage. Le mariage était une institution éphémère qui se faisait et se défaisait au gré des alliances. Les répudiations étaient fréquentes pour stérilité, adultère, non-exécution des clauses matérielles du traité de mariage, consanguinité (afin d’éviter la dispersion du patrimoine et l’immixtion de lignages étrangers dans la vie politique de la maison). Elles sont condamnées par l’Eglise et celle-ci fait du mariage un sacrement (XIIe siècle).

Divers points sont codifiés avec la réforme grégorienne; ce sont les tribunaux ecclésiastiques (les officialités) qui sont juges des affaires matrimoniales. On les retrouve dans la définition du mariage dans l’ Institution au droit françois.

  • Les empêchements au mariage
  • La demande de dispense
  • Les conditions à remplir pour se marier
  • Le rôle du prêtre
  • Le mariage sous la Révolution

Les empêchements au mariage

  1. Les empêchements prohibitifs (le mariage est valable mais pas licite):
    • le vœu simple de chasteté
    • des fiançailles précédemment contractées avec un autre
    • l’état de pénitence publique
    • le meurtre de sa femme, de son mari ou d’un prêtre
    • une personne ayant précédemment contracté mariage avec une religieuse, connue pour telle
  2. Les empêchements dirimants absolus (aucun mariage n’est possible):
      • le défaut de raison: la personne ne peut évidemment pas donner son consentement (ne sont pas concernées les personnes ayant d’un périodes de lucidité, les sourds et les muets de naissance)
      • le défaut de puberté: il faut que ceux qui se marient soient en état d’avoir des enfants, 14 ans pour les garçons et 12 ans pour les filles à moins d’une preuve de leur puberté.
      • l’impuissance: le mariage ayant pour fin principale la procréation des enfants, elle doit être de naissance, ou survenue à l’occasion d’une amputation de “quelqu’une des parties nécessaire à la génération”; la vieillesse n’est pas prise en compte.
        On rencontre bien une soeur d’un de mes ancêtres, Marguerite Hilgert (1724- ?) qui épouse en 1747, à l’âge de 22 ans, Jean George Metzger, âgé de 74 ans, veuf de Marie Barbe Scholin (v1679-1747). Ses parents étant tous deux déjà décédés, ce sont deux de ses frères, Théodore Hilgert (ca1712-1772 Sosa 606) et Jean Hilgert (1717- ?), théologien, qui la marient. De force ? En tout cas si elle croyait être veuve rapidement, elle eut bien tort : Jean-George Metzger est mort le 12 mars 1772 âgé de 100 ans moins six mois ! Ils ont même eu au moins trois fils : Pierre en 1748, Jean en 1751 et Nicolas.
    • un mariage subsistant: les coupables de polygamie ou de divorce sont excommuniés car le mariage, à l’image du Christ et de l’Église, doit être unique et indissoluble. Si le second mariage invalidé a été contracté de bonne foi, l’époux(se) se croyant veuf(ve), et qu’il est né des enfants du second lit, ces enfants ne sont pas considérés bâtards. La mort civile (bannissement à perpétuité ou condamnation aux galères perpétuelles) n’est pas considérée comme rupture de mariage.
    • la profession religieuse, si les vœux sont valides
    • l’engagement dans les ordres sacrés, dont la prêtrise
  3. Les empêchements dirimants relatifs (ceux qui rendent nul un mariage contracté avec certaines personnes):
    • la parenté naturelle ou consanguinité: au VIIIe siècle, l’interdiction du mariage entre consanguins s’étendait jusqu’au septième degré; mais le concile de Latran IV (1215) a ramené l’interdiction du mariage au quatrième degré, pour éviter les trop nombreuses répudiations faites jadis par les nobles sous prétexte de consanguinité (que l’Église et le corps social tiennent en horreur, ces unions débouchant sur une dégénérescence génétique et, dans le meilleur des cas, sur un repli communautaire)
    • l’affinité: “tous les parents du mari sont les affins de la femme, tous les parents de la femme sont les affins du mari”. Il est défendu d’épouser la veuve de son frère, ou la sœur de sa défunte femme par exemple. La défense de mariage pour affinité suit les mêmes règles que pour la parenté naturelle. Les parents d’affinité, qui viennent de l’union illicite, sont ceux qui ont eu de mauvais commerces avec les père ou mère, frère ou sœur, cousin ou cousine germains de celui ou celle que l’on veut épouser. Cette affinité nécessite des dispenses jusqu’au deuxième degré inclus.
    • la parenté civile: l’adoption crée une parenté civile équivalente à la parenté naturelle.
    • la parenté spirituelle: elle procède du baptême, parce que celui ou celle qui a tenu un enfant sur les fonds baptismaux, contracte avec lui une affinité qui le rend comme son père ou sa mère, la sage-femme qui baptise l’enfant est comprise dans cette parenté spirituelle. Il contracte en outre une autre affinité avec les père et mère de l’enfant (compaternité ou compérage). Le concile de Trente a abrogé la parenté spirituelle qui existait entre le baptisé et les enfants de son parrain et de sa marraine, et celle qui existait entre le parrain et la marraine.
    • l’empêchement résultant d’honnêteté publique: les fiançailles créent une espèce d’affinité entre celui qui a été fiancé et la famille de la personne à qui il l’a été, de telle sorte qu’il ne peut épouser la sœur (le frère) de celle (celui) avec qui il était fiancé sans dispense. Le mariage que la mort a dissout avant la consommation entraîne une parenté semblable à un mariage consommé, à l’affinité.
    • le rapt et la séduction, le consentement mutuel des deux contractants étant nécessaire pour établir la légitimité du mariage, ce mariage ne peut avoir lieu que si la personne ravie n’étant plus sous l’emprise de son ravisseur y consent; la séduction est une forme de rapt qui vaut rapt.
    • l’adultère: si le mariage a été contracté de mauvaise foi (les deux époux sachant très bien que l’un est déjà marié) il ne peut être réhabilité même après le veuvage de celui qui était déjà marié; par contre, si l’un a été trompé par l’autre et qu’il réclame la réhabilitation après le veuvage de son conjoint, la réhabilitation peut être accordée.
    • le meurtre: ne peuvent contracter mariage un meurtrier et le conjoint survivant s’il était consentant ou ils commettaient l’adultère.
    • la diversité de religion: c’est l’édit de Louis XIV de 1680 qui interdit le mariage ente catholique et hérétique.

La demande de dispense

Il est possible de demander une dispenses pour se marier malgré certains empêchements, car il est bien difficile de ne pas être apparenté avec ses voisins.

Si on fait le calcul du nombre de nos ancêtres, on a 2 parents, 4 grands-parents, 8 arrières-grands-parents, etc … Ainsi, on a à peu près 256 ancêtres qui ont vécu la Révolution. Le nombre d’ancêtres vivants en 1650 (date “raisonnable” en fonction des archives existantes) se monte alors à plus de 4000.

On aurait ainsi 2 milliards d’ancêtres ayant vécu à l’époque de Charlemagne ! C’est impossible, on aurait plus d’ancêtres que la population mondiale !!!

Ce calcul qui multiplie par 2 les ancêtres à chaque génération est théorique. En fait, nos ancêtres se mariaient entre cousins plus ou moins éloignés.

Pour les recherches généalogiques, cela facilite la tâche car cela réduit le nombre d’ancêtres à chercher; par exemple, deux cousins germains qui se marient ensemble n’ont à eux deux que 6 grand-parents différents au lieu de 8.

Mais d’un autre côté, ça complique aussi le travail car on se retrouve souvent avec beaucoup d’homonymes, entre les cousins germains, les pères et les fils qui portent le même prénom et donc sèment la confusion ! (Olivier Bréjon)

Les dispenses accordées sont les suivantes: la consanguinité, l’affinité (accordée pour le mariage avec le frère ou la sœur de son défunt conjoint, avec le veuf ou la veuve de son oncle ou sa tante, et plus éloigné), l’affinité spirituelle (accordée facilement), l’honnêteté publique (accordée avec des collatéraux), le meurtre (accordée quand le mariage a eu lieu avent la découverte du meurtrier). Ces dispenses sont accordées par l’Eglise. Seule la dispense pour religion était accordée par le Roi.

La consanguinité
C’est la parenté qu’entretiennent tous les individus pouvant être reconnus comme des parents au sens biologique, à quelque degré que ce soit. La dispense pour consanguinité est accordée entre l’oncle et la nièce et entre parents à partir du 3e degré.

On calcule les degrés de parenté de différentes façons:

Suivant le droit civil
On remonte à l’ancêtre commun puis l’on redescend au parent concerné.
Suivant le droit canon
Il faut remonter dans chacune des deux branches à l’ancêtre commun.

Il peut donc y avoir des parents de générations différentes. Par exemple, du 3e au 4e degré de consanguinité, ce sont des cousins issus de germains.

Voici un schéma trouvé dans une dispense:

Si sous l’Ancien Régime, les interdictions de mariage pour consanguinité étaient plus sévères qu’aujourd’hui. Elles étaient également plus nombreuses car les familles restant souvent plusieurs générations dans un même village, les jeunes gens avaient plus de risques de s’épouser entre cousins, ce qui était interdit par l’Eglise. Ce sont la situation sociale, la promiscuité, la protection d’un patrimoine qui ont favorisé les mariages consanguins, les futurs époux pouvant demander des dispenses (autorisations) de mariage qui leur étaient accordées lorsque le degré de parenté était assez éloigné.

Il est intéressant de trouver les dossiers envoyés par les prêtres des paroisses, prouvant la consanguinité des époux (exemple). Les dispenses étaient délivrées par la cour de Rome (pour le deuxième degré) et les autres degrés par l’évêché, il fallait attendre de 2 à 6 mois selon les régions.

Si le mariage a eu lieu sans dispense alors qu’il y avait consanguinité, le mariage doit être réhabilité, les époux doivent obtenir dispense et repasser devant le curé. Dans ce cas précis, les dispenses sont facilement accordées. J’ai relevé à Pavant (02) un certain nombre de ces réhabilitations, des années après le premier mariage. En voici un exemple dont le détail a été fourni par Christian Terrier à mon cousin Olivier Bréjon:

“L’an mil sept cent soixante et trois, le dimanche cinq juin, vû l’acte de dispense de l’empêchement du quatrième degré de Consanguinité accordée par mon frère Gosser Vicaire Général de Monseigneur l’Evêque de Soissons en date du trois du présen mois et an, ainsi signée: Gosser Vicaire Général, contresigné: Laurens Secrétaire, Scellé du Sceau dudit seigneur Evêque a dûment insinué au greffe des insinuations Ecclesiastiques les mêmes jour et an, et ainsi signé: Blin au bas duquel acte qui est resté entre mes mains, se trouve la dispense de publications de bans;
Vû aussi l’acte du mariage prétendu, fait en cette Eglise le vingt six novembre mil sept cent soixante entre François Rahault fils de Gilles Rahault vigneron et de Marguerite Mardienne ses père et mère d’une part et Marie Hélène Bréjon fille d’Augustin Bréjon aussi vigneron et de Marie Jeanne Marquis ses père et mère d’autre part, tous deux de cette paroisse, lequel mariage se trouve nul, les parties n’ayant point lors de la célébration obtenu dispense dudit empêchement du quatrième degré de consanguinité dont elles se trouvaient liées et qu’elles ignoraient,
Je soussigné Prêtre Curé de cette paroisse en vertu de la permission donnée par le dit Sr Gosse Vicaire Général de marier le dimanche, ai reçu de nouveau en cette église le mutuel consentement de mariage des susdites Parties et leur ai donné la Bénédiction Nuptiale avec pères desdits François Rahault et Marie Hélène Bréjon, d’Estienne Marquis, vigneron, leur beau frère et de Charles de Graimbergty maître d’école, tous de cette paroisse lesquels ont signé avec nous excepté lesdits Gilles Rahault et Estienne Marquis qui ont déclaré ne savoir signer de ce interpellés.Signatures:
Marie  Hélène Bréjon
François Rahault
Augustin Bréjon
de Graimbergty
Delahaye Curé de Pavant”

 

  1. Pour appuyer leur demande de dispense, ils pouvaient apporter des “causes” :
    – quand la fille n’a trouvé personne pour se marier selon sa condition, qu’un parent.
    – quand la fille n’a aucun bien, ou quasiment et qu’un parent veut bien lui donner un mariage avantageux.
    – quand une veuve chargée d’enfants veut épouser un parent qui connaît bien le commerce difficile de son défunt mari.
    quand la fille a 24 ans ou plus, et qu’elle n’a trouvé personne pour se marier sauf son parent.
    – quand la fille court le risque d’épouser un hérétique si elle n’épouse un sien parent dont elle connaît l’orthodoxie.
    – lorsque le mariage arrange de grandes inimitiés ou procès entre les familles.
    – quand les porteurs sont né d’un lieu dont les habitants sont presque tous parents (de consanguinité ou d’affinité).
    – quand il y a eu union charnel entre les demandeurs, qu’ils veulent réparer et éviter le scandale.
    – quand il y a risque de relations prématurées dues au grand amours qu’ils éprouve l’un pour l’autre.L’Instruction très facile et nécessaire pour obtenir en cour de Rome toutes forme d’expéditions (par Jacques Pelletier, Paris,1680) contient un chapitre sur les tarifs des dispenses de mariage. Ce tarif est semble t-il assez complexe car établi en fonction de la condition des demandeurs, du degré de parenté et de la présence ou l’absence de cause, et pouvait aller de 45 livres à 4500 livres. Pourtant le Conseil de Trente ordonne que les dispenses soient accordées gratuitement !
    Lexique
    – cousin… : voir les tableaux !!!
    – cousin germain: même grand-père, même grand-mère
    – frère consanguin: même père
    – frère germain: même père, même mère
    – frère utérin: même mère

Les conditions à remplir pour se marier

    • pour les mineurs de 25 ans: consentement du père, ou en cas de décès du père de la mère, du tuteur ou du curateur (pour ces deux dernier avec l’accord des parents vivants)
      Il arrive que de jeune gens soient mariés justement parce qu’ils ont perdu leurs parents et que c’est un moyen pour la parenté de ne pas les avoir en charge. Il en est certainement ainsi des enfants D’Arville, tous mariés très jeunes par leur grand-père paternel. Le père, Jean D’Arville, homme de loi, est mort en 1676 à 35 ans; la mère, Jeanne Jacquet est morte 4 ans plus tard aussi âgée de 35 ans. Elle laisse 4 enfants dont l’aînée est mariée immédiatement:
      – Catherine (1667- ?), mariée en 1680 à 13 ans 3 mois
      – Marie-Jeanne (1668-1729 épouse en secondes noces de mon sosa 2250), mariée en 1684 à 15 ans 7 mois
      – Jean (1670- ?), marié en 1690 à 19 ans 8 mois
      – Etiennette (1673-1727 Sosa 2249), mariée en 1691 à 18 ans 10 jours et remariée en 1692 à 18 ans 10 mois !
  • 3 publications de bans
  • célébration dans la paroisse du domicile de l’un des contractants
  • présence de 4 témoins
  • plus de 30 ans pour l’homme et plus de 25 ans pour la femme: ils peuvent contracter mariage sans risque d’exhérédation s’ils ont requis par acte public le consentement parental (même sans l’avoir obtenu).

Le rôle du prêtre

Traditionnellement, c’est le père de la mariée qui cédait la tutelle de sa fille au futur mari en échange des arrhes que celui-ci lui versait. Mais les choses changent dans les années 1180, ce rôle jusque là tenu par le père de la mariée est dès lors joué par le prêtre qui devient le véritable maître de cérémonies du mariage, les noces sont célébrées à l’église et c’est lui le seul officiant. L’usage romain de la vélation se répand : au cours de la messe, le prêtre bénit les mariés réunis sous un même voile. A partir du XIVe siècle, il introduit dans le rituel la formule ” Ego conjugo vos ” (Je vous unis) au moment où les mains des futurs époux sont jointes. Il va même jusqu’à bénir le lit nuptial. Ce rôle prédominant du prêtre va reléguer les fiançailles à un second plan.


Le mariage sous la Révolution

Grande nouveauté révolutionnaire, le mariage devient civil, et n’est donc plus indissoluble. La législation sur le mariage se trouve dans la loi du 20 septembre 1792 sur l’état civil. Le nouveau droit, sous l’influence du droit canonique, facilite le mariage et le permet aux hommes à partir de 15 ans révolus, aux filles à partir de 13 ans révolus, la majorité étant fixée à cette époque à 21 ans. Pour les mineurs, le consentement du père est nécessaire ; à défaut, celui de la mère ; à défaut, celui des cinq plus proches parents paternels ou maternels ; à défaut encore, « on y suppléera par des voisins pris dans le lieu où les mineurs sont domiciliés ». Le mariage n’est prohibé que « entre les parents naturels et légitimes en ligne directe, les alliés dans cette ligne et entre le frère et la soeur ». Les tribunaux jugent que l’inégalité des conditions, la différence de couleur, d’âge, de fortune et d’état, ne peuvent être, de la part des parents, un obstacle au mariage de leurs enfants. De même, le mariage d’un vieillard n’est pas susceptible d’opposition de la part de ses filles et de ses gendres. La loi fait du mariage un acte solennel qui s’accomplit à la Maison commune en présence de l’officier municipal et de quatre témoins. La jurisprudence de la Cour de cassation estime cependant que le mariage est valable, quand bien même il n’est pas célébré dans la Maison commune, dès lors que le consentement des époux est libre. D’autre part, même si l’un des témoins est une femme, le mariage est considéré comme valide.

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