Avant-noms : ce sont les termes honorifiques.

Mais encore ? Et bien au cours de mes recherches en Haute-Savoie j’ai découvert que mes ancêtres portaient quasiment systématiquement des titres honorifiques. Et ce de façon bien plus régulière que dans mes recherches en France en général.

Ce sera l’occasion de vous présenter aujourd’hui les frères Claude et Laurens BOZET.

Leurs parents : Égrège François Bozet et Pancrade Pinget Vers

Lors de son mariage et de son décès à Viuz-en-Sallaz, François est qualifié de discret.

R.P. de Viuz-en-Sallaz (A.D. Haute-Savoie)

Que signifie ce terme ?  Et bien ce terme désigne un jeune homme de bonne famille. Il peut être conservé toute la vie ou évoluer vers un autre terme plus élevé car c’est un terme qu’on pourrait classer dans les termes honorifiques du haut de la société villageoise.

Le père de François était lui-même un discret Jehan BOZET.

R.P. de Viuz-en-Sallaz (A.D. Haute-Savoie)

Quant au grand-père, il est hon. Claude BOZET. Est-ce l’abréviation de honorable ou de honnête ? Honorable désigne plutôt un gros marchand, un bon artisan, quelqu’un qui a de quoi dans l’existence (un certain nombre d’honorables peuvent aussi porter l’avant-nom de maître) tandis qu’honnête désigne un homme membre des classes populaires peu fortuné mais honorablement connu, il peut aussi signifier un enracinement familial ancien.

François BOZET est aussi appelé maître François BOZET dans certains actes, il est fermier de l’évêque de Genève, plus précisément châtelain et fermier du mandement de Thiez. Cette charge consistait à représenter l’évêque sur ses terres. Sa résidence n’était plus établie au château qui n’était plus qu’une ruine dès le début du XVIIe siècle. En effet, Viuz-en-Sallaz avait à cette époque la particularité de faire partie du Mandement de Thyez. C’est à dire que les habitants étaient sujets directs des princes-évêques de Genève au même titre que les habitants de Genève et ce depuis des siècles (1185 précisément). Pour en savoir plus c’est par ici en attendant un article plus complet.

Source : Monographie de Viuz-en-Sallaz, Edmond Rollin

Quelques actes qualifient François BOZET de égrège. Ce titre honorifique est surtout employé en Savoie du nord, presque jamais au sud, il est plus ou moins synonyme de honorable pour les professions du droit telles que les notaires et disparaît en principe à la fin du XVIIe siècle. En étudiant les familles de Viuz-en-Sallaz, je dirais qu’il se situe juste au-dessus du terme discret. Quant au terme maître, il est plus vaste et est porté en principe par deux catégories : en premier lieu par les hommes de loi de second rang (comme les procureurs, les notaires, les praticiens et les greffiers et autres fonctionnaires subalternes de la Cour des Comptes et du Sénat) et en second lieu par des artisans qualifiés et établis, les compagnons ne portant pas cet avant-nom. C’est dans le premier sens qu’il faut l’entendre ici.

La mère de François BOZET, quant à elle, appartenait à la riche famille des BAILLARD BERTHET de Fillinges qui remonte à un Amed BAILLARD au XVe siècle et dont nombre de membres sont des égrèges.

François BOZET épouse une fille de Bogève, Pancrade PINGET VERS, dont je ne sais pas encore grand chose en dehors de ses parents et de sa fratrie.

Source : Site des Marmottes de Savoie Généalogie et Histoire

Les frères : Discrets Laurens et Claude BOZET

Discrets Laurens et Claude BOZET sont nés vers 1642 et 1655. Ils ont eu au moins un frère en 1647 qui n’a pas dû vivre très longtemps et au moins cinq sœurs dont quatre se sont établies, deux à Loëx, une à Fillinges et une dernière est restée à Viuz-en-Sallaz où elle s’est alliée à la grande famille des DE DEMUSY, notaires.

Discret Laurens BOZET exerce conjointement avec son père la charge de châtelain et fermier du mandement de Thiez. Mais il est également notaire. Son frère discret Claude BOZET devient à son tour châtelain épiscopal.

Ils épousent deux sœurs honorable Jeanne Péronne ou Peronnaz RIGAUD (°~1639-1699) et honorable Jeanne Claudine RIGAUD (°~1653-1710), peut-être bien née Claudine Françoise RIGAUD en 1655 à Fillinges. Les deux sœurs sont filles du notaire égrège maitre Claude Antoine RIGAUD de Fillinges (lui-même frère utérin des nobles de BELLEGARDE) et de noble demoiselle et égrège Anthoina CHESNAY.

La descendance :

  • Discret Laurens BOZET et honorable Jeanne Péronne RIGAUD ont au moins eu 6 enfants dont 3 sont morts en bas âge. Leurs deux garçons n’ont eu que des filles comme héritières. Je descends de leur fils aîné égrège et maitre Claude Anthoine ou Anthoine BOZET (°~1668-1728).
R.P. de Bonneville (A.D. Haute-Savoie)

On le rencontre aussi bien souvent comme discret. Leur fille Françoise BOZET dont je descends épousera honorable Pierre Pellet.

  • Discret Claude BOZET et honorable Jeanne Claudine RIGAUD n’ont, quant à eux, qu’un garçon, qui meurt à moins de 30 ans sans alliance, et six filles dont l’avant dernière est aussi mon ancêtre.

On découvre au fil des actes notariés du premier quart du XVIIIe siècle le déclin social de la famille avec le décès prématuré des deux frères discrets Laurens et Claude BOZET en 1682, et 1691 et que Claude Anthoine BOZET n’a su redresser. Beaucoup d’actes avec spectable Joseph Hyppolithe Fernex l’expriment très clairement, ou avec le sieur Pierre Reymond et avec Révérend messire Jean Terrier, par exemple. Ah, voici encore d’autres termes ! Le spectable est le terme supérieur : en principe ont droit à ce titre les docteurs en droit ou en médecine. C’est un titre très strict qui identifie facilement l’avocat ou le médecin qui le porte. Le sieur traduit l’appartenance de celui qui le porte à la bourgeoisie la plus élevée, des spectables et des honorables peuvent être des sieurs. Et Révérend messire désigne un ecclésiastique.


Pour récapituler ces avant-noms honorifiques je les classerais ainsi :

      1. Spectable (Sp/Spble)
      2. Égrège (Eg)
      3. Discret (Dt)
      4. Honorable (Hble ou Hon.)
      5. Honnête (Hte ou Hon.)

Révérend messire quant à lui a une place à part car il désigne les hommes d’église.
Je classe aussi à part le Sieur (Sr) et le Maitre (Me).

11 commentaires

  1. Ben voilà j’ai appris quelque chose ce soir avant d’aller me coucher ! Merci pour cet article très clair.
    En Anjou on rencontre aussi quelques uns de ces termes : sieur (pour le seigneur, le propriétaire d’un lieu…), honorable et honnête ( pour les bourgeois, les marchands et toutes les personnes un peu respectables … ) et maître ( très usité : pour les notaires, les chirurgiens, les artisans en tout genre …). En revanche, discret ne s’utilise que pour les ecclésiastiques dans l’expression “vénérable et discret”.
    Bonne continuation pour ce challenge.

  2. Tres interessant articles, je ne connais que quelques uns de ces titres, je crois n’avoir jamais croise de discret, d egrege ou de spectable. Particularités locales peut etre ?

  3. Voilà qui est très très intéressant ! J’ai appris quelque chose, car j’ai rencontré ces termes et n’avait pas soupçonné à quel point ils permettaient de “poser” des individus dans leur siècle.




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